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VIEILLES HISTOIRES DE PAYS BRETON

Les plus forts ont de ces vertiges. On ne saurait penser à tout.

C’est ce que Margéot se disait, le soir du jour où il eut avec Gohéter-Coz la conversation relatée plus haut.

Il pouvait être environ neuf heures. Soudain un paysan, le garçon d’écurie, se précipita dans la cuisine en poussant un cri d’alarme :

— Les gabelous !

D’un coup de poing, Margéot l’abattit sur le sol.

— Imbécile ! murmura-t-il entre ses dents, cela t’apprendra A te mêler de ce qui ne te regarde pas.

Et, calme, il prit une chandelle sur la table de la cuisine, pour éclairer ces « messieurs de la douane ».

— À quoi dois-je l’honneur de cette visite tardive ?

Ils étaient une vingtaine d’habits verts, presque tous des stipendiés du maître de Kercabin. Mais à leur tête s’avançait crânement le nouveau sous-patron. Il avait, en effet, la mine blanche et menue d’une fillette. On lui eût donné seize ans, tout au plus. Les yeux seuls étaient d’un homme : des yeux noirs qui regardaient droit devant eux, des yeux virils, aux prunelles énergiques.

Il s’inclina légèrement.

— Monsieur, répondit-il, je soupçonne fort cette maison d’être un dépôt de recel pour des marchandises de contrebande. Pas plus tard que ce matin, il a été transporté un foudre d’alcool. Je me vois dans la nécessité de procéder & une perquisition domiciliaire. Je vous serai reconnaissant de me faciliter cette tâche ; au besoin, je vous en requiers.

— Je croyais que ma maison et moi devions être au dessus de semblables soupçons, dit Margéot. Ce n’est pas d’hier que j’habite le pays. Je n’y suis pas, comme vous, un nouveau venu. Faites, monsieur. Toutes les portes