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VIEILLES HISTOIRES DE PAYS BRETON

Il n’y a pas une fille en Plouëc
Qui n’ait à Kercabin couché.

Le « vieux de Kercabin et ses gars » étaient, parait-il, de terribles séducteurs. Aussi magnifiques d’ailleurs que violents. Il y avait chez eux « une chambre toute remplie d’anneaux d’argent et d’anneaux d’or ». Kercabin et ses fils y faisaient entrer le matin leurs maîtresses de la nuit, et leur permettaient de puiser au tas, à mains pleines. Les jolies paysannes d’alentour rêvaient dans leur lit clos, sous le chaume, de cette chambre merveilleuse ; elles en causaient entre elles tout bas, au lavoir, quelquefois à l’église. Le « trésor » de Kercabin exerçait une sorte de fascination sur tout le pays, à sept lieues à la ronde. À Plouëc, à Plouézal, à Guingamp même, quand on voyait passer une fille de peu avec un châle rouge ou violet sur les épaules et une croix d’argent au cou, on disait :

— En voici une qui revient pour sûr de Kercabin !


II

Pendant la Révolution, le manoir et le vaste domaine qui en dépendait furent vendus comme biens nationaux. C’est sans doute à cette époque qu’ils passèrent aux mains de mon grand oncle Margéot. Ce farouche ancêtre a laissé derrière lui une légende fantastique dont je vais entrete-