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HISTOIRE PASCALE


IV

Le vieux recteur était rentré depuis quelque temps dans l’étable, quand on gratta faiblement à la porte. Il alla ouvrir : c’était le petit gardeur de vaches.

— Je viens de la part de maître Jean, murmura l’enfant : il vous fait dire que tout va bien. Le chef est parti pour l’endroit que vous savez, et ses trois hommes, ivres-morts, ronflent comme des serpents d’église.

— Dieu soit loué !… quelle heure est-il ?

— Minuit passé.

— C’est donc le moment… Aide-moi à terminer les derniers préparatifs.

Le vieillard plongea les mains dans son bissac, en tira successivement un crucifix de cuivre, un ciboire, un surplis, des fioles contenant le vin à consacrer… Le tout fut disposé sur la charrette renversée qui devait tenir lieu d’autel… Le pâtre sortit, puis revint avec deux longues chandelles de résine qui furent allumées en guise de cierge.

— Les gens sont dans le bois, qui attendent, dit-il.

— C’est bien… Que Jean Derrien donne le signal ! répondit le prêtre, déjà revêtu de son surplis.

Peu après, un hou ! strident, prolongé, d’oiseau de nuit retentit dans le vaste silence. Des formes d’hommes, de femmes, d’adolescents et de fillettes, surgirent en foule des profondeurs sombres.