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de juif-errant. Sur le trottoir d’une rue déserte, bordée de hautes façades sévères où pas une devanture de magasin ne brillait, un homme qui courait me bouscula. C’était un allumeur de réverbères.

Je songeai :

« À Gorlébella aussi, en ce moment, ils allument !… Savoir qui est de garde au feu… Chevanton ?… Louarn ? »

Louarn, Chevanton, Gorlébella, à me redire ces noms, il me sembla qu’ils sonnaient en moi comme les mots d’une autre langue, d’une langue jadis pratiquée, mais que j’aurais désapprise. Était-ce assez loin, tout cela, assez évanoui, assez perdu !… Et tout de même je m’étais mis à suivre le coureur, intéressé, en somme, par son manège qui était un peu celui de ma profession, amusé par cette menue flamme qu’il faisait jaillir de bec en bec… Brusquement, je m’arrêtai, comme cloué au sol. Juste en face de moi, de l’autre côté de la rue, un cadre de bois