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entendue, cette phrase, et toujours avec quel tressaillement de joie profonde ! C’est ainsi qu’il avait coutume de m’apostropher, lorsqu’en montant pour me relever de ma garde, il me trouvait absorbé dans mes éternelles méditations d’amour. Il avait un plaisir espiègle à me surprendre, faisait exprès de gravir les marches une à une, sans bruit, et de se précipiter dans la chambre à l’improviste.

— Ne rougis pas, continuait-il (car je me laissais tutoyer par lui, comme par un frère cadet), ne rougis pas et va te coucher !

Il m’arrivait de lui obéir, les nuits où j’étais trop las. Mais, le plus souvent, je restais à tourner dans la lanterne, sous prétexte de régler l’appareil, de mesurer la hauteur de l’huile ou d’inspecter quelque rouage ; en réalité, j’attendais qu’il me dît, de sa voix un peu gouailleuse :

— Tu préfères causer ? Soit. Causons.

Il me contait des épisodes de sa vie sénégalienne,