Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.

l’adore que rarement. Il est fréquent aussi que seules les âmes des chefs soient l’objet d’un culte.

Peut-être l’Ankou de chaque village était-il chez les Bretons, aux temps très anciens, le chef le plus récemment mort. Puis l’organisation par clans et le culte des ancêtres ont tous deux disparu ; mais il a survécu quelque chose de ce culte dans cette sorte de religion de la mort, qui maintenant encore est très vivante en Basse-Bretagne. C’est autour d’un seul personnage que dans chaque village se sont groupés les débris de ce culte déclinant ; ce mort distingué entre tous les morts, c’est, sans doute méconnu et méconnaissable pour tous, le chef jadis adoré. On a oublié son caractère seigneurial, parce que l’organisation sociale, qui le rendait intelligible, pour tous a disparu ; mais ce qui a survécu dans la mémoire populaire, c’est que ce mort, objet d’un culte, était toujours un mort récent. Puis comme l’introduction du christianisme avait fait déchoir ce personnage sacré de sa qualité divine, et qu’il était resté dans les mémoires un souvenir confus de sa puissance, il est devenu une sorte de génie, messager de mort. Son rôle protecteur a passé sans doute aux êtres surnaturels, apparus plus récemment dans la religion populaire : les anges et les saints. Il ne lui est resté des fonc-