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aux évocations d’outre-tombe, il a prodigué les monuments funéraires. Voyager en Bretagne, c’est fouler le sol classique des ossuaires et des charniers. Il n’est pas de bourgade si humble, pour ainsi parler, qui n’ait le sien ou qui n’en exhibe au moins les débris. Anciennement, une église bretonne n’allait jamais sans un ossuaire, soit aménagé dans ses murs mêmes, soit distant d’elle de quelques pas. En face de la maison de Dieu, on voulait la « maison des morts », ces autres dieux de la mythologie primitive, et la dévotion des vivants ne s’attachait pas moins à l’une qu’à l’autre. Souvent l’ossuaire était plus beau, plus orné, plus monumental que l’église, comme c’est le cas pour les chapelles funéraires de la Roche-Maurice et de Saint-Servais. Beaucoup sont de pures merveilles architecturales. Les citer tous équivaudrait à dresser une interminable liste de paroisses. Il en est, comme le campo-santo de Saint-Pol-de-Léon, avec sa large enceinte jalonnée d’édicules gothiques, qui donnent l’impression, non plus d’un temple, mais d’une véritable cité de la mort. Les plus misérables d’aspect sont, du reste, parfois les plus saisissants, et, pour mesurer à quel point les Bretons se complaisent aux voisinages funèbres les plus tristement suggestifs, il n’est que de pérégriner dans les pauvres villages de la montagne, à Lanrivain, par exemple, ou à Spézet. Vieux, délabré, la toiture crevassée par les