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calvaire. A ce moment le chien noir était parvenu à la saisir par le bas de sa jupe. Mais elle, se précipitant, étreignit l'arbre de la croix et s'y tint cramponnée de toutes ses forces.

Le chien noir disparut aussitôt, en lâchant un aboi terrible1.

Le chien blanc resta seul auprès de la malheureuse

et se mit à lécher ses blessures. Le jeune homme dit alors à Faut Ar Merrer : — Vous pouvez maintenant continuer votre route.

Il n'est que minuit. Ne vous exposez plus à voir ce

1. D'après un conte irlandais (G. Dottin, Contes irlandais traduits du gaélique, p. 137), la Vieille de Bêara vit un jour passer une femme aussi blanche qu'un cygne et qui dépassait le vent dans sa course. Derrière elle venaient deux mâtins qui avaient deux mètres de langue enroulés autour de leurs cous ; un globe de feu sortait de leur gueule. A la suite des chiens, il y avait un carrosse noir attelé de deux chevaux, et chaque roue laissait sur la route une traînée de feu. Une voix sortit du carrosse et demanda à la Vieille de Bêara si elle n'avait rien vu passer. Elle raconta ce qu'elle avait vu et demanda ce que signifiaient la femme et les deux mâtins : « Je suis le diable, dit la voix, et ce sont deux mâtins que j'ai envoyés à la poursuite de cette âme... C'est une femme qui a offensé un prêtre, elle est morte en état de péché mortel  ; si les mâtins ne l'atteignent pas avant qu'elle soit arrivée au ciel, elle obtiendra son pardon par l'intercession de la Vierge et elle sera hors de mon atteinte. Mais si les mâtins l'atteignent avant qu'elle soit arrivée au ciel, elle est à moi. »

On ne doit pas pleurer les défunts avant qu'il ne se soit écoulé trois heures ou au moins une heure depuis la mort, car la plainte de ceux qui se lamentent pourrait attirer les chiens qui guettent lesâmes pour les dévorer avant qu'elles n'aient atteint le trône de Dieu (lady Wilde, Ancient Legends, p. 118, 214).