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Tout cela était bien extraordinaire, car la trappe du grenier n’avait pas été levée depuis plus d’une semaine, et, en tous cas, il n’y avait dans ce grenier qu’un peu de balle d’avoine, quelque menu fagot, et pas une seule planche.

Je criai à haute voix :

— Qui est-ce donc qui fait là-haut tout ce bruit, pour empêcher des chrétiens de dormir ?

Je fis ensuite le signe de la croix et j’attendis…

Mais dès que j’eus parlé le bruit cessa.

Le lendemain, j’allai à la rivière laver-des draps. Pour se rendre de chez nous au Guindy[1], il n’y a pas de route, mais un étroit sentier, qui longe sur presque tout le trajet des talus plantés d’aulnes. Je m’étais à peine engagée dans le sentier que j’entendis un pas derrière moi, et aussi une respiration haletante, ainsi qu’un bruissement dans les branches d’aulne qui surplombaient. Chose étrange : je reconnus distinctement le pas de mon mari, le pas qu’il avait du temps qu’il était bien portant, quand il rentrait de sa journée dans une des fermes d’alentour.

Je me retournai.

Personne !  !.

Je passai la matinée au lavoir. Au retour, je n’entendis plus rien, mais le faix de linge que je portais se mit à peser sur mes épaules d’un tel poids qu’on aurait juré que la toile s’était changée en plomb. J’ai compris depuis ce que cela signifiait. Parmi ces draps

  1. Le Guindy traverse le territoire de Pluzunet. C’est lui qui conflue à Tréguier avec le Jaudy.