Or, à l’époque des moissons,
Un paysan le vit et détourna la tête
D’un air tout à fait dédaigneux.
L’arbrisseau fut choqué, de cet air malhonnête.
— Si j’avais un maître soigneux,
Dit-il en agitant sa tête à moitié sèche,
Je grandirais et serais beau ;
Transplante-moi, pour voir, dans un riche terreau.
Le bon paysan prit sa bêche
Et du sol appauvri tira l’arbre plaintif ;
Ne doutant pas qu’il fut d’un fort bon caractère,
Il alla le planter au milieu de sa terre,
Et fut bien attentif
À lui donner des soins de toutes sortes.
Le cenellier grandit ;
Son feuillage verdit,
Couvrant d’un voile épais les branches demi-mortes ;
Mais sous ce beau feuillage avaient aussi poussé
Les épines cruelles.
Elles se cachaient mieux et déchiraient les ailes
De l’oiseau confiant qui s’envolait blessé.
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livre cinquième