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fables

 Or, lui, voilà qu’en songe
 Il allonge
 Et la patte et le cou,
 Et chaque coup de griffe
 Prend un rat impudent,
 Et chaque coup de dent
 Le biffe
 Du nombre des vivants.
 Dans ses rêves émouvants,
 Il finit par tous les détruire.
« Émouvants » c’est le mot qu’il me faut pour traduire
 De pareils songes, en effet,
 Et ce n’est pas une cheville.
 Notre chat, satisfait,
Se réveille, s’étire et se recroqueville ;
Il se dit que jamais on ne vit coup pareil,
 Et s’en va faire la sieste
 Sur la porte, au soleil.
Les rats grugent partout : on les voit, on l’atteste ;
Mais il n’en croit plus rien, il en a tant mangé.
C’est en ce moment-là qu’il fut pris et jugé.


Rêver, c’est fort plaisant, souvent c’est une trêve
À la banalité ;
Mais gardez-vous toujours de prendre votre rêve
Pour la réalité.