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livre troisième

Des esprits sérieux et des cœurs bienfaisants.
Auprès de leurs travaux bien humble est mon ouvrage
Et je sens quelquefois s’affaisser mon courage.
Laisserai-je pourtant mon livre inachevé ?
 Comme le grain de sénevé
Il deviendra peut-être un arbre au rameau sombre
 Qui prêtera son ombre
 Au voyageur fatigué.
Écrivons donc encor : que m’importe le blâme
Si mes récits, enfants, charment votre jeune âme ?
Parmi les ennuyeux si je suis relégué,
J’aurai pour m’excuser le désir de vous plaire
 En vous donnant de bons conseils.
 Vous m’offrirez vos fronts vermeils,
Je les embrasserai, ce sera mon salaire.

Je vais dire aujourd’hui l’histoire d’un coquin ;
 Une assez longue histoire
Que vous conserverez bien dans votre mémoire,
Car on ne la trouve plus, même dans le bouquin.
Le coquin dont je parle était un jeune lièvre.
C’est drôle, n’est-ce pas ? et l’on n’aurait pas cru
Que ce triste animal put avoir un mot cru
 Sur la lèvre
 Et de l’audace dans le cœur.