Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les exigences du vieux maître vis-à-vis de l’orchestre lui causèrent bien des embarras, dont il sut triompher patiemment. Il ne cessa de montrer une grande déférence à l’auteur de la Vestale, qui le prit en affection et lui donna amicalement, en le quittant, ce singulier conseil : « Quand j’ai entendu votre Rienzi, j’ai dit : C’est un homme de génie, mais il a déjà fait plus qu’il ne peut faire. Croyez-moi, renoncez dès maintenant à la composition dramatique. »

Il avait tout d’abord espéré pouvoir rénover bien des choses autour de lui, et relever le niveau artistique à Dresde ; mais il se heurta à des résistances et à des préjugés qui lui firent abandonner ses projets de réforme. Il apporta pourtant une grande ténacité dans les études de la 9me Symphonie de Beethoven, et, parvenant à communiquer son enthousiasme à ses musiciens, il obtint une exécution merveilleuse, qui fut une véritable révélation pour son public dilettante. À ce concert assistaient, dit-on, deux de ses futurs disciples et collaborateurs, Hans de Bulow et Hans Richter.

Au milieu de ses multiples occupations, il trouva le temps d’écrire une cantate, la Cène des apôtres, qui fut exécutée en 1843 à l’église Notre-Dame, mais dont les très remarquables qualités passèrent tout à fait inaperçues. Son œuvre principale durant cette période fut l’édification de son opéra Tannhauser.

Il en avait, pendant les dernières semaines de son séjour en France, conçu une première idée en lisant les légendes de Tannhauser et de Lohengrin dans le vieux minnesinger Wolfram d’Eschenbach, et il fut séduit par le parti que l’on pouvait tirer du concours de chant à la Wartburg. Dès cette époque, abandonnant l’esquisse presque terminée d’un poème sur Manfred, il rompit décidément