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timbres ; elles sont plus apparentes que réelles ; elles disparaissent dans l’exécution symphonique, et à Bayreuth on ne s’en aperçoit pas le moins du monde ; tout l’ensemble est admirablement fondu, d’une douceur, d’une harmonie et d’une plénitude incomparables, sauf de rares exceptions voulues dans une intention pittoresque.

L’attention de l’auditeur est bien plus sollicitée par le mouvement individuel des parties, par leur caractère expressif, par l’intérêt que leur communique l’apparition suggestive des Leit-motifs, par la diversité des timbres instrumentaux, que par l’individualité des accords considérés en eux-mêmes. Chaque voix symphonique chante une partie indépendante ayant son sens propre, dialoguant avec les autres, toujours appropriée à la nature et au timbre de l’instrument interprète, sans traces de formules banales d’accompagnement, sans remplissage d’aucun genre.

Autrefois on disait que dans Wagner il n’y avait pas de mélodie ; je crois être plus dans le vrai en disant qu’il n’y a pas d’accompagnements, mais des superpositions de mélodies.

Constatons en plus, pour tâcher d’être complet, la disparition totale des marches d’harmonie, que presque toutes les écoles abandonnent aujourd’hui en raison de leur banalité ; la suppression des redites, des reprises d’un motif principal annoncées par une rentrée, ceci au même titre que la suppression de toute répétition de vers ou de mots ; toujours et partout du nouveau, de l’invention, de l’imprévu et de l’ingénieux, toujours de la création, de la sincérité et de la vie…, et nous aurons, je crois, touché aux principaux points caractéristiques de ce qu’on nomme un peu trop brièvement la formule wagnérienne, formule qu’on ne saurait trop admirer et contempler, mais que