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préparé le nouvel asservissement en la plongeant dans son lourd sommeil magnétique.

Il se livre à des incantations et fait brûler des herbes, dont les épaisses vapeurs emplissent la scène. De ces fumées violettes et sinistres émerge confusément et tout au fond de la salle la forme vague et comme fluidique de Kundry. S’éveillant de sa léthargie, elle répond à l’envoûteur par un cri de douleur et d’angoisse qui se résout en un long gémissement. Il se met à la railler de son attachement pour les chevaliers du Graal, vers lesquels elle retourne dès qu’elle est libérée du pouvoir magique, et lui rappelle en ricanant de quelle aide précieuse elle lui a été malgré tout, lorsqu’il s’est agi de faire succomber la pureté et la vertu d’Amfortas. L’infortunée, cherchant à recouvrer la parole, se débat contre ces odieux souvenirs et les maudit d’une voix rauque et entrecoupée. Mais Klingsor, impitoyable, poursuit en lui annonçant que, pour aujourd’hui même, il lui réserve une victoire encore plus éclatante, car il s’agit de vaincre un être protégé des faiblesses de la chair par le rempart de l’innocence. Kundry, au comble de l’angoisse, refuse en vain d’obéir : le maudit lui rappelle qu’il est son maître, le seul sur qui le pouvoir magique de sa beauté ne saurait avoir de prise… Kundry, poussant alors un éclat de rire strident, le raille à son tour sur sa chasteté forcée ; le sorcier, rendu furieux par cette allusion, lui déclare qu’on ne l’insulte pas en vain : combien chèrement a-t-il fait payer à Titurel et à sa race le mépris qu’ils lui ont témoigné lorsqu’il a voulu s’enrôler dans leur pieuse cohorte !

Mais voici venir le jeune héros, que le sorcier, monté sur la muraille de la tour, aperçoit au loin : plus de résistance, il faut se préparer à le vaincre. Kundry lutte