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solennel serment à ne jamais trahir leur alliance, et cimentent le pacte en buvant tour à tour dans une corne, ayant auparavant mêlé au breuvage quelques gouttes de leur sang. Hagen, qui a refusé de participer à l’engagement fraternel, prétextant de son origine bâtarde, et s’est tenu à l’écart, brise la corne d’un coup d’épée, tandis que Gutrune, inquiète et agitée, est venue présider au départ des guerriers ; il médite et pense avec une ironie méchante que ces deux vaillants, égarés, l’un par ses perfides conseils, l’autre par son odieux sortilège, sont en train d’édifier sa fortune à lui, l’humble fils du Nibelung.

Un superbe rideau se déploie sur le devant de la scène et la ferme ; lorsqu’il se rouvre, on voit, comme au prologue, le rocher de la Walkyrie.

Scène iii. — Brünnhilde, silencieuse et pensive, est assise à l’entrée de la grotte, contemplant l’anneau que Siegfried lui a donné, et qu’elle couvre de baisers passionnés. Elle entend au loin un bruit jadis familier : c’est le galop d’un coursier aérien ; elle prête l’oreille, et, ravie, s’élance au-devant de Waltraute, la Walkyrie sa sœur, qui vient la trouver dans sa retraite et dont elle ne remarque pas l’expression d’inquiétude ; est-ce le pardon du dieu trop sévère que sa compagne chérie lui apporte enfin ? Wotan s’était adouci envers la coupable, puisqu’il avait permis que le feu dévorant la protégeât dans son sommeil, et que de son châtiment même sortît sa félicité ; elle appartient maintenant à un héros dont l’amour l’enivre d’orgueil et qui a fait d’elle la plus heureuse des femmes.

Waltraute, qui ne partage pas l’allégresse de sa sœur, est venue à elle pleine d’angoisse et, malgré la défense de Wotan, pour la conjurer de sauver le Walhalla du malheur qui le menace : depuis l’exil dont il a frappé la fille de son vœu, le dieu des armées, inquiet, découragé, n’a cessé