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le tronc périt, et la source en même temps se tarit. — Qu’arriva-t-il alors ? Et la Norne, jetant le câble à sa deuxième sœur, l’invite à parler à son tour. — Wotan, reprend la Sibylle, avait gravé sur son épieu les runes des traités qui faisaient sa force ; il vit, sombre présage, son arme brisée dans sa lutte avec un jeune héros ; alors il réunit les guerriers du Walhalla et leur fit abattre le frêne du monde. Qu’advint-il depuis ? demande la Norne à sa plus jeune sœur, à qui elle lance la corde. — Les héros formèrent un bûcher colossal autour de la demeure des éternels, et Wotan est silencieusement assis au milieu de l’auguste assemblée des dieux. Si le bois, s’embrasant, allume le Burg magnifique, ce sera la fin des maîtres du monde. Wotan a asservi le rusé Loge et l’a fixé en flammes claires autour du rocher de Brünnhilde ; puis il a plongé les éclats de son arme brisée au cœur du flamboyant. Que se passe-t-il alors ? — Le fil que tressent les Nornes s’embrouille, le roc tranchant l’entame ; c’est l’anathème d’Alberich, le ravisseur de l’or du Rhin, qui porte ses funestes fruits ; enfin le câble se rompt par le milieu, et avec lui s’évanouit la clairvoyance des trois sœurs, qui se lèvent épouvantées ; elles en renouent les bouts avec précipitation et, se liant entre elles, elles descendent dans les profondeurs de la terre retrouver Erda, leur mère éternelle.

Le jour s’est levé progressivement ; il brille maintenant de tout son éclat et laisse voir Siegfried arrivant armé en guerre, et Brünnhilde qui l’accompagne, tenant son noble coursier Grane par la bride.

L’amoureux couple, qui goûte déjà depuis de longs jours un radieux bonheur, échange des serments de fidélité. Brünnhilde a transmis à son époux les runes sacrées