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muse au front divin, et que la douce inoage d’Eva est inséparablement unie dans son âme à la première manifestation de génie quelle y a fait éclore.

Les Maîtres émus écoutent avec ravissement ; le peuple commence à manifester librement son admiration pour le jeune poète, et, sans attendre la décision du tribunal, proclame avec enthousiasme sa victoire. Les Maîtres sanctionnent alors le jugement de la foule et décernent le prix à Walther, au milieu de la joie générale. Eva, qui depuis le commencement a écouté avec extase le chant de son bien-aimé, s’avance radieuse au bord de l’estrade et dépose sur le front du vainqueur, agenouillé devant elle, une couronne de myrtes et de lauriers ; puis elle le conduit à son père, devant lequel ils s’inclinent tous les deux et qui étend ses mains pour les bénir.

La foule acclame Hans, qui a si judicieusement su comprendre et défendre le poète méconnu hier et admiré maintenant ; mais la tâche du bon Sachs n’est pas tout à fait terminée : le jeune vainqueur, peu soucieux de la Maîtrise que veut lui conférer Pogner, dédaigne de s’enrôler dans la phalange des Maîtres Chanteurs et refuse la chaîne ornée de l’image du roi David qui est l’insigne de l’ordre. Hans lui fait comprendre quelle serait son ingratitude s’il agissait ainsi envers ces hommes qui viennent de lui décerner le Prix si précieux à son bonheur ; il lui rappelle aussi tout le mérite qu’ils ont eu de conserver intactes les nobles traditions de l’art allemand, et termine en faisant un chaud panégyrique du génie et de l’art national, qu’il sent menacés par les vicissitudes que traverse l’Empire et qu’il recommande au patriotisme et à la fidélité de tous.

À ces mots, les exclamations du peuple recommencent, plus enthousiastes que jamais ; Eva prend la couronne