Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/187

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’air en cette nuit de Saint-Jean peut-être ?… Cette idée de la Saint-Jean qui surgit tout à coup dans son cerveau lui rappelle qu’il a une tâche à accomplir en ce jour maintenant arrivé. Il s’agit de manœuvrer habilement et de mettre tout en jeu pour aboutir au bonheur des deux enfants dont il protège les amours.

Scène ii. — À ce moment la porte du cabinet s’ouvre et livre passage à Walther, qui reste un instant immobile à contempler Sachs ; celui-ci se retourne et laisse glisser l’in-folio de ses genoux à terre.

Walther, qui a reçu une cordiale hospitalité de son protecteur, a passé sous son toit une nuit réconfortante et réparatrice, pendant laquelle il a fait un rêve d’une idéale beauté. Hans l’invite alors à prendre ce rêve comme base de son Chant de Concours : car il veut lui voir tenter l’aventure, malgré sa déconvenue de la veille. Il ne faut pas garder rancune à d’honnêtes gens qui ont pu se tromper en toute sincérité et ont été un peu troublés par la forme nouvelle et impétueuse du lied qu’on leur présentait. Sachs ne perd nullement espoir de voir son protégé réussir ; sans cela n’aurait-il pas été le premier à favoriser la fuite et l’union des deux amoureux ? Allons, vite au travail, et que Walther compose un beau chant de Maître.

Mais d’abord, qu’entend-on par chant de Maître ? réplique le gentilhomme ; à quoi servent ces règles étroites qu’ils prétendent imposer à tous ? Le génie peut-il s’accommoder ainsi des entraves que l’on met à son essor ? — Certes, lui dit le bon Sachs, au printemps de la vie, alors que toute l’ardeur, la sève de la jeunesse affluent au cœur, au cerveau, le génie peut se passer des règles et réussit souvent sans leur secours à produire une œuvre belle et forte ; mais quand les ans, quand la vie avec son cortège