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paix, mais le roi s’y refuserait, car il voit sans cesse croître l’étendue de ses maux. »

Le bon Ruedigêr envoya vers Dietrîch pour demander s’ils ne pourraient pas calmer le courroux du grand roi. Le chef de Vérone lui fit répondre : — « Qui pourrait l’arrêter ! Le roi Etzel ne veut point que quelqu’un s’interpose. »

Un guerrier d’entre les Hiunen voyant Ruedigêr debout, les yeux remplis de larmes (combien il en avait déjà versées !), dit à la reine : — « Voyez, comme il se tient là immobile, celui qui a le plus de puissance auprès d’Etzel,

« Et à qui tout est soumis, le pays et ses habitants. Comment Ruedigêr a-t-il obtenu tant de burgs qu’il a reçus de la munificence du roi ? En ce combat, il n’a pas encore frappé un seul coup digne de louange.

« Il me semble qu’il s’inquiète peu de ce qui se passe ici, depuis qu’il a obtenu tout ce qu’il désirait avoir. On prétend qu’il est plus brave que nul autre ; mais dans ces moments difficiles, cela n’a guère paru. »

L’homme très loyal avait l’âme affligée ; quand il entendit ce discours, il regarda le guerrier en face et pensa : — « Tu le payeras cher. Quoi ! tu dis que je suis lâche ! Tu as prononcé cette parole trop haut dans cette cour. »

Et serrant le poing, il s’élança vers le Hiune et le frappa si violemment qu’à l’instant il l’étendit mort à ses pieds. La détresse du roi Etzel en fut augmentée.

— « Va-t’en, lâche bavard, s’écria Ruedigêr, j’ai assez de peine et de douleur dans le cœur. Comment oses-tu me reprocher que je ne me batte point ? Certes, je devrais haïr ces étrangers,