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jeune homme — il me semble que je saurai bien servir de si puissants rois — je garderai ces marches à mon honneur. » Rien ne pouvait être plus funeste pour les guerriers de Kriemhilt.

Hagene reprit la parole : — « Je m’étonne grandement de ce que ces Hiunen murmurent entre eux. Je pense qu’ils se passeraient volontiers de celui qui garde la porte et qui a apporté ici aux Burgondes la fatale nouvelle.

« Il y a longtemps que j’ai entendu dire que Kriemhilt ne pouvait oublier ses afflictions de cœur. Maintenant buvons à l’amitié et payons l’écot du vin du roi. Et d’abord, au jeune prince des Hiunen. »

Et Hagene, ce brave héros, frappa l’enfant Ortlieb si terriblement, que le sang jaillit le long de son épée sur ses mains, et que la tête sauta jusque sur les genoux de sa mère. Alors commença parmi ces guerriers un grand et effroyable carnage.

Il asséna sur le maître qui soignait l’enfant un si fort coup de son épée, qu’à l’instant sa tête tomba au pied de la table. C’était une triste récompense qu’il donnait là à ce maître.

Voyant près de la table d’Etzel un ménestrel, il s’élance vers lui dans sa fureur, et lui abat la main droite sur sa viole : — « Voilà pour ton message dans le pays des Burgondes.

— « Hélas ! ma main, s’écria Werbel. Seigneur Hagene de Troneje, que vous ai-je fait ? Je vins en toute loyauté au pays de vos maîtres. Et maintenant que j’ai perdu ma main, comment ferai-je résonner les accords ? »

Et quand il n’eût jamais plus joué de la viole, qu’importait à Hagene ! Plein de fureur, il fit aux guerriers