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veux m’en aller. Jamais, pour aucun d’entre eux, je ne me lèverai de mon siège.

« Certes, il nous convient de laisser là cette courtoisie. Pourquoi ferais-je honneur à qui me porte de la haine ? Jamais je ne le ferai, tant que la vie me restera. Et d’ailleurs je m’inquiète peu de l’inimitié de la femme du roi Etzel. »

L’arrogant Hagene posa sur ses genoux une épée très brillante ; sur le pommeau se détachait un jaspe éclatant, plus vert que l’herbe. Kriemhilt reconnut bien que c’était celle de Siegfrid.

En reconnaissant l’épée, toute sa douleur la reprit. La poignée était d’or, le fourreau fait d’un galon rouge. Cela lui rappela ses malheurs ; elle se mit à pleurer. Je pense que Hagene le hardi avait agi ainsi à dessein.

Volkêr le rapide plaça près de lui sur le banc un archet puissant, long et fort, tout semblable à un glaive large et acéré. Les deux chefs superbes étaient là assis sans nulle peur.

Ces deux hommes audacieux étaient si altiers, qu’ils ne voulurent point se lever de leur siège par crainte de qui que ce fût. La noble reine passa devant eux et leur fit un salut plein de haine.

Elle parla : « Maintenant, sire Hagene, qui vous a envoyé quérir, que vous ayez osé chevaucher en ce pays, vous, qui savez bien tout le mal que vous m’avez fait ? Avec un peu de bon sens, vous eussiez bien pu renoncer à ce voyage. »

— « Personne ne m’a envoyé quérir, répondit Hagene, mais on a invité en ce pays trois chefs, qui sont mes maîtres. Je suis leur homme-lige, et en de semblables voyages de cour, je suis rarement resté en arrière, »