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— « De tout ce que j’ai jamais vu, dit Hagene, je ne désire rien tant posséder que ce bouclier pendu là à ce mur ; je voudrais bien le porter à mon bras au pays d’Etzel. »

Quand la margrave entendit les paroles de Hagene, elles réveillèrent ses douleurs. Elle se prit à pleurer. Elle pensait avec un intime regret à la mort de Nuodung[1], que Witeg avait tué ; elle ne put retenir ses gémissements.

Elle dit au guerrier : — « Je vous donnerai ce bouclier. Que le Dieu du ciel n’a-t-il permis qu’il vécût encore celui qui le portait à son bras ! Il fut tué dans le combat, je le pleurerai toujours. Hélas ! malheureuse ! je ne puis m’en empêcher. »

La noble margrave se leva de son siège et de ses blanches mains prit le bouclier. La dame le porta à Hagene et il le mit à son bras. Ce don était offert avec honneur au héros.

Une enveloppe de brillantes étoffes voilait son éclat. Jamais le soleil ne fit reluire les nobles pierreries d’un meilleur bouclier. Celui qui eût voulu l’acheter aurait bien dû payer mille marcs.

Hagene ordonna d’emporter le bouclier. Mais voici Dancwart qui se rend à la cour. La fille du margrave lui donna de riches vêtements, qu’il porta chez les Hiunen, l’âme joyeuse.

De tous les présents qu’ils reçurent rien ne serait venu en leurs mains, sans la grande générosité de Ruedigêr, qui

  1. Ce fils de Ruedigêr et de Gœtelint avait été tué, suivant les traditions, au combat de Ravenne.