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d’être aux ordres des gens. Aussi acceptait-il rarement un paiement quelconque, et ses serviteurs étaient aussi très fiers. Hagene restait toujours de ce côté-ci de l’eau.

Alors il cria avec tant de force, que tous les échos du fleuve retentirent de la puissance de sa voix ; car le héros était excessivement fort : — « Viens me prendre, moi, Amelrîch. Je suis un des hommes d’Else qui ai quitté le pays par suite d’une grande inimitié. »

Il lui présenta, au bout de son épée levée en l’air, un bracelet d’or rouge, beau et brillant, afin qu’il le passât dans la terre de Gelpfrât. Le fier nautonnier saisit lui-même la rame en sa main.

Il était d’humeur très difficile, ce batelier ! Le désir d’une grande récompense lui amena une mauvaise fin. Il voulut gagner l’or rouge de Hagene et il reçut ainsi une mort affreuse par l’épée du chevalier.

Le nautonnier rama vigoureusement jusqu’à l’autre bord. Ayant entendu nommer quelqu’un qu’il ne trouva pas, il entra dans une terrible colère quand il vit Hagene, et, furieux, il adressa la parole au héros :

— « Il est possible que votre nom soit Amelrîch. Mais vous ne ressemblez guère à celui que je croyais ici, lequel est mon frère de père et de mère. Maintenant que vous m’avez trompé, vous resterez à l’autre bord. »

— « Non point, par Dieu le tout puissant, répondit Hagene. Je suis un guerrier étranger et d’autres chevaliers sont confiés à mes soins. Acceptez donc de bonne amitié la récompense que je vous offre pour me passer à l’autre rive, je vous en serai vraiment très reconnaissant. »

Le nautonnier reprit : — « Non, cela ne peut se faire. Mes seigneurs bien-aimés ont des ennemis, et pour ce