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vient désormais. Comment oserais-je me présenter à cette cour, devant ces guerriers ? Si mon corps jadis avait quelque beauté, il l’a maintenant complètement perdue. »

Dame Uote dit alors à sa fille bien-aimée : — « Fais, chère enfant, ce que tes frères te conseillent, suis tes amis ; il t’en arrivera bonheur. Je t’ai vue si longtemps plongée en une si profonde douleur ! »

Souvent elle avait prié Dieu d’accorder encore à Kriemhilt de pouvoir distribuer de l’or, de l’argent et des vêtements, comme elle le faisait jadis avec son époux, quand il vivait. Mais elle ne vécut plus pour d’aussi heureux jours.

Kriemhilt se disait en elle-même : — « Mais si je dois abandonner mon corps à un païen, moi, femme chrétienne, il me faudra toujours sur la terre en porter la honte. Quand il me donnerait tous ses royaumes, non, je ne dois pas le faire. »

Elle en resta là, et toute la nuit jusqu’au jour, la dame reposa sur sa couche en proie à mille pensées. Ses yeux si brillants versèrent des larmes jusqu’au matin, à l’heure où elle se rendit à matines.

Au temps de la messe, les rois étaient arrivés et avaient pris leur sœur par la main, lui conseillant d’agréer la demande du roi du Hiunen-lant. Mais aucun d’eux ne trouva la pauvre femme plus joyeuse.

On fit venir les hommes d’Etzel, qui auraient désiré obtenir leur congé pour partir, soit avec un consentement, soit avec un refus, quoi qu’il en pût être. Quand Ruedigêr arriva à la cour, ses guerriers lui dirent

Qu’il leur semblait bon à tous qu’on pressentit les dispositions du noble Gunther et qu’on le fit à temps, le