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Pendant ce discours arrivèrent Ortwîn et Gêrnôt, et ces héros conseillèrent la mort de Siegfrid. Survint aussi Gîselher, le fils de la belle Uote. Quand il entendit leur propos, il leur parla avec loyauté :

— « Ô vous, excellents guerriers, pourquoi feriez-vous cela ? Certes Siegfrid ne mérite point une telle haine, qu’il faille ainsi lui enlever la vie. Un rien excite la colère des femmes ? »

— « Est-ce que nous élèverons des bâtards, répliqua Hagene ; d’aussi braves guerriers en tireront peu d’honneur. Puisqu’il s’est vanté aux dépens de sa suzeraine, il le paiera de sa vie, ou je veux mourir. »

Le roi lui-même parla : — « Il ne nous a rien fait, si ce n’est pour notre bien et notre gloire. Il faut lui laisser la vie. Que vous en semblerait-il si je haïssais ce guerrier ? Il nous fut toujours fidèle et tout dévoué. »

Ortwîn, la bonne épée de Metz, parla : — « À coup sûr sa grande force ne lui servira de rien. Si vous me le permettez, mon maître, je lui ferai tout le mal possible. » Depuis lors, les héros lui devinrent ennemis et sans bonne raison.

Mais personne n’y songea plus, si ce n’est Hagene qui répétait à chaque instant à Gunther, que si Siegfrid cessait de vivre, maint territoire du roi lui serait soumis. Le prince en devint sombre.

Ils en restèrent là. Les joutes recommencèrent. Ah ! quelles fortes lances on brisa devant la cathédrale jusqu’au palais, en présence de la femme de Siegfrid. Mais les hommes de Gunther étaient pleins de mécontentement.

Le roi dit : — « Renoncez à cette fureur sanguinaire. Il est né pour notre gloire et pour notre prospérité. Mais