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l’observateur ; il verra le soleil éclipsé, et si le diamètre apparent de la lune surpasse celui du soleil, l’éclipse sera totale ; mais si ce diamètre est plus petit, l’observateur verra un anneau lumineux formé par la partie du soleil, qui déborde le disque de la lune, et alors l’éclipse sera annulaire. Si le centre de la lune n’est pas sur la droite qui joint l’observateur et le centre du soleil ; la lune pourra n’éclipser qu’une partie de la circonférence du disque solaire, et l’éclipse sera partielle. Ainsi, les variétés des distances du soleil et de la lune, au centre de la terre, et celles de la proximité de la lune à ses nœuds, au moment de ses conjonctions, doivent en produire de très-grandes dans les éclipses de soleil. À ces causes se joint encore l’élévation de la lune sur l’horizon, élévation qui change la grandeur de son diamètre apparent, et qui, par l’effet de la parallaxe lunaire, peut augmenter ou diminuer la distance apparente des centres du soleil et de la lune, de manière que de deux observateurs éloignés entr’eux, l’un peut voir une éclipse de soleil, qui n’a point lieu pour l’autre observateur. En cela, les éclipses de soleil diffèrent des éclipses de lune, qui sont les mêmes pour tous les lieux de la terre.

On voit souvent l’ombre d’un nuage emporté par les vents, parcourir rapidement les coteaux et les plaines, et dérober aux spectateurs qu’elle atteint, la vue du soleil, dont jouissent ceux qui sont au-delà de ses limites : c’est l’image exacte des éclipses totales du soleil. Une profonde obscurité qui dans des circonstances favorables, peut durer au-delà de cinq minutes, accompagne ces éclipses. La subite disparition du soleil, et les épaisses ténèbres qui lui succèdent, remplissent les animaux, de frayeur : les étoiles qu’effaçoit la clarté du jour, se montrent dans tout leur éclat, et le ciel paroît comme dans une nuit sombre. On apperçoit autour du disque lunaire, une couronne d’une lumière pâle, et qui, probablement, est l’atmosphère même du soleil ; car son étendue ne peut convenir à celle de la lune, et l’on s’est assuré par les éclipses du soleil et des étoiles, que cette dernière atmosphère est presqu’insensible.

L’atmosphère dont on peut concevoir la lune environnée, infléchit les rayons lumineux, vers le centre de cet astre ; et si, comme cela doit être, les couches atmosphériques sont plus rares, à mesure