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essai philosophique

deux caractères zéro et l’unité. Il imagina que Dieu pouvant être représenté par l’unité, et le néant par zéro, l’Être suprême avait tiré du néant tous les êtres, comme l’unité avec le zéro exprime tous les nombres dans ce système d’arithmétique. Cette idée plut tellement à Leibnitz, qu’il en fit part au jésuite Grimaldi, président du tribunal de Mathématiques à la Chine, dans l’espérance que cet emblème de la création convertirait au christianisme l’empereur d’alors, qui aimait particulièrement les sciences. Je ne rapporte ce trait que pour montrer jusqu’à quel point les préjugés de l’enfance peuvent égarer les plus grands hommes.

Leibnitz, toujours conduit par une métaphysique singulière et très déliée, considéra que la suite plus un, moins un, plus un, etc., devient l’unité ou zéro, suivant que l’on s’arrête à un nombre de termes impair ou pair ; et comme dans l’infini il n’y a aucune raison de préférer le nombre pair à l’impair, on doit, suivant les règles des probabilités, prendre la moitié des résultats relatifs à ces deux espèces de nombres, et qui sont zéro et l’unité ; ce qui donne pour la valeur de la série. Daniel Bernoulli a étendu depuis ce raisonnement à la sommation des séries formées de termes périodiques. Mais toutes