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jette en l’air est homogène et que ses deux faces soient entièrement semblables, on juge croix et pile également possibles ; 2o a posteriori, en répétant un grand nombre de fois l’expérience qui peut amener l’événement dont il s’agit, et en examinant combien de fois il est arrivé ; 3o enfin, par la considération des motifs qui peuvent nous déterminer à prononcer sur l’existence de cet événement ; si, par exemple, les adresses respectives des deux joueurs et sont inconnues, comme on n’a aucune raison de supposer plus fort que on en conclut que la probabilité de pour gagner une partie est Le premier de ces moyens donne la possibilité absolue des événements ; le second la fait connaître à peu près, comme nous le ferons voir dans la suite, et le troisième ne donne que leur possibilité relative à l’état de nos connaissances.

Chaque événement étant déterminé en vertu des lois générales de cet univers, il n’est probable que relativement à nous, et, par cette raison, la distinction de sa possibilité absolue et de sa possibilité relative peut paraître imaginaire ; mais on doit observer que, parmi les circonstances qui concourent à la production des événements, il y en a de variables à chaque instant, telles que le mouvement que la main imprime aux dés, et c’est la réunion de ces circonstances que nous nommons hasard : il en est d’autres qui sont constantes, telles que l’habileté des joueurs, la pente des dés à retomber sur une de leurs faces plutôt que sur les autres, etc. ; celles-ci forment la possibilité absolue des événements, et leur connaissance plus ou moins étendue forme leur possibilité relative ; seules, elles ne suffisent pas pour les produire : il est de plus nécessaire qu’elles soient jointes aux circonstances variables dont j’ai parlé ; elles ne font ainsi qu’augmenter la probabilité des événements, sans déterminer nécessairement leur existence.

Les recherches que l’on a faites jusqu’ici sur l’analyse des hasards supposent la connaissance de la possibilité absolue des événements, et, à l’exception de quelques remarques que j’ai données dans les Tomes VI et VII des Mémoires des Savants étrangers, je ne sache pas