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continents, la pente des rivages et mille autres causes dont l’effet Bftt très sensible sur nos côtes, cette hauteur serait moindre. On peut donc regarder au moins comme très probable que la profondeur moyen ne de la mer n’est pas au-dessous de quatre lieues ; nous pourrions prononcer avec plus de certitude sur cet objet important, si nous connaissions exactement le rapport de la densité de la mer à la densité moyenne de la Terre, et si nous avions un plus grand nombre d’observations faites avec soin dans la mer du Sud et le plus loin qu’il est possible des continents ; indépendamment de l’utilité dont elles nous seraient dans la discussion présente, elles serviraient encore à nous éclairer sur un phénomène des marées, dont la théorie ne peut rendre raison, et qui me paraît être l’effet des obstacles que la mer éprouve dans ses oscillations. Il résulte des formules précédentes que, dans les nouvelles et pleines lunes, la haute mer doit arriver à midi, et que le temps des syzygies est celui où la différence de la haute à la basse mer est à son maximum ; or on observe assez généralement que la haute mer n’arrive dans les syzygies qu’une heure ou deux après midi et que les plus hautes marées n’ont lieu qu’un jour ou deux après les syzygies. On pourrait cependant justifier la théorie, en considérant que nos formules ne représentent que la partie des oscillations de la mer qui est due à l’action du Soleil et de la Lune et qu’il serait possible, en ayant égard aux oscillations qui dépendent de l’état primitif de la mer, d’expliquer les retards que l’on observe dans les marées ; mais, en réfléchissant de nouveau sur les raisons qui m’ont déterminé à négliger ces oscillations, il me paraît de plus en. plus indubitable que, sans l’action continue du Soleil et de la Lune, les eaux de la mer seraient depuis longtemps parvenues à l’état d’équilibre, en vertu des frottements et des résistances en tout genre qu’elles éprouvent : il est donc extrêmement probable que ces retards sont l’effet des obstacles que les continents et les îles opposent aux oscillations de la mer, puisque sur nos côtes, où l’influence de ces obstacles est plus sensible, les retards des marées sont très variables d’un port à l’autre, et qu’en général la théorie se rapproche d’autant plus des observations, qu’elles