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On voit par là l’imperfection de toutes les théories connues sur le flux et sur le reflux de la mer, et combien il était nécessaire de résoudre, avec plus de rigueur qu’on ne l’a fait encore, ce problème, l’un des plus intéressants et des plus compliqués de toute l’Astronomie physique ; c’est à remplir cet objet, au moins autant qu’il m’a été possible, que sont destinées les recherches suivantes, et j’ose espérer que l’importance et la difficulté de la matière pourront leur mériter quelque attention de la part des géomètres ; je devais naturellement m’attendre à ce que, ayant fait entrer dans ma solution toutes les circonstances essentielles du problème, mes résultats approcheraient beaucoup plus de l’observation que ceux de la théorie ordinaire, sur le peu de différence qui existe entre les deux marées d’un même jour : aussi ai-je eu la satisfaction de voir qu’ils donnent, dans les hypothèses les plus vraisemblables sur la profondeur de la mer, une infinité de moyens d’expliquer pourquoi cette différence est aussi peu considérable : je regarde l’explication de ce phénomène comme un des principaux avantages de mes recherches. Elles m’ont donné lieu de faire une remarque qui me paraît utile dans la théorie de la précession des équinoxes et de la nutation de l’axe de la Terre ; il ne suffit pas, dans cette théorie, de considérer l’action du Soleil et de la Lune sur la partie solide de cette planète : il faut encore avoir égard à l’action de ces deux astres sur les eaux de la mer. Imaginons, en effet, que la Terre soit un ellipsoïde de révolution recouvert par la mer ; il est clair que, tant que le Soleil sera dans le plan de l’équateur, son action sur la Terre et sur les eaux qui la recouvrent étant égale et symétrique des deux côtés de l’équateur, il ne peut en résulter aucun dérangement dans la position de l’axe de rotation de la Terre ; mais, si l’on suppose le Soleil décliner vers l’un ou vers l’autre pôle, son action ne sera plus la même sur les deux moitiés de la Terre formées par la section du plan de l’équateur : les eaux de la mer, distribuées différemment sur ces moitiés par l’action du Soleil, les attireront d’une manière différente et presseront inégalement leurs surfaces. On conçoit donc qu’alors il doit y avoir un dérangement dans la position de l’axe de la Terre, produit non seule-