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progrès des arts et de l’Astronomie ont pu faire espérer des méthodes pour avoir les longitudes à la mer, les nations commerçantes se sont empressées de diriger par de puissants encouragements les vues des savants et des artistes sur cet important objet. Leurs vœux ont été remplis par l’invention des montres marines, et par l’extrême précision à laquelle on a porté les Tables lunaires, deux moyens bons en eux-mêmes, et qui deviennent encore meilleurs en se prêtant un mutuel appui.

Une montre bien réglée dans un port dont la position est connue, et qui, transportée sur un vaisseau, conserverait la même marche, indiquerait à chaque instant l’heure que l’on compte dans ce port.

Cette heure étant comparée à celle que l’on observe à la mer, le rapport de leur différence au jour entier serait, comme on l’a vu, celui de la différence des longitudes à la circonférence. Mais il était difficile d’avoir de pareilles montres ; les mouvements irréguliers du vaisseau, les variations de la température et les frottements inévitables et très sensibles dans des machines aussi délicates étaient autant d’obstacles qui s’opposaient à leur exactitude. On est heureusement parvenu à les vaincre, et à exécuter des montres qui, pendant plusieurs mois, conservent une marche à très peu près uniforme, et qui donnent ainsi le moyen le plus simple d’avoir les longitudes à la mer ; et comme ce moyen est d’autant plus précis que le temps pendant lequel on emploie ces montres sans vérifier leur marche est plus court, elles sont très utiles pour déterminer la position respective des lieux fort voisins ; elles ont même à cet égard quelque avantage sur les observations astronomiques, dont la précision n’est point augmentée par le peu d’éloignement des observateurs.

Les éclipses des satellites de Jupiter, qui se renouvellent fréquemment, offriraient au navigateur un moyen facile de connaître sa longitude, s’il pouvait les observer à la mer ; mais les tentatives que l’on a faites pour surmonter les difficultés qu’opposent à ce genre d’observations les mouvements du vaisseau ont été jusqu’à présent infructueuses. La Navigation et la Géographie ont cependant retiré de grands