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rigoureuse que l’on observe entre les mouvements angulaires de rotation et de révolution de chaque satellite. Il y a l’infini contre un à parier qu’il n’est point l’effet du hasard. La théorie de la pesanteur universelle fait disparaître l’infini de cette invraisemblance, en nous montrant qu’il suffit, pour l’existence du phénomène, qu’à l’origine ces mouvements aient été très peu différents. Alors l’attraction de la planète a établi entre eux une parfaite égalité ; mais en même temps elle a donné naissance à une oscillation périodique dans l’axe du satellite, dirigé vers la planète, oscillation dont l’étendue dépend de la différence primitive des deux mouvements. Les observations de Mayer sur la libration de la Lune et celles que MM. Bouvard et Nicollet viennent de faire sur le même objet, à ma prière, n’ayant point fait reconnaître cette oscillation, la différence dont elle dépend doit être très petite ; ce qui indique avec une extrême vraisemblance une cause spéciale, qui d’abord a renfermé cette différence dans les limites fort resserrées où l’attraction de la planète a pu établir, entre les mouvements moyens de rotation et de révolution, une égalité rigoureuse, et qui ensuite a fini par détruire l’oscillation que cette égalité a fait naître. L’un et l’autre de ces effets résultent de notre hypothèse ; car on conçoit que la Lune, à l’état de vapeurs, formait, par l’attraction puissante de la Terre, un sphéroïde allongé, dont le grand axe devait être dirigé sans cesse vers cette planète, par la facilité avec laquelle les vapeurs cèdent aux plus petites forces qui les animent. L’attraction terrestre continuant d’agir de la même manière, tant que la Lune a été dans un état fluide, a dû à la longue, en rapprochant sans cesse les deux mouvements de ce satellite, faire tomber leur différence dans les limites où commence à s’établir leur égalité rigoureuse. Ensuite cette attraction a dû anéantir peu à peu l’oscillation que cette égalité a produite dans le grand axe du sphéroïde, dirigé vers la Terre. C’est ainsi que les fluides qui recouvrent cette planète ont détruit par leur frottement et par leur résistance les oscillations primitives de son axe de rotation, qui maintenant n’est plus assujetti qu’à la nutation résultante des actions du Soleil et de la Lune. Il est facile de se convaincre que l’égalité des mouvements