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éloignerait indéfiniment, l’apparence d’une lumière blanche et continue, d’un petit diamètre ; car l’irradiation, qui subsiste même dans les meilleurs télescopes, couvrirait l’intervalle des étoiles. Il est donc probable que, parmi les nébuleuses, plusieurs sont des groupes d’un très grand nombre d’étoiles, qui, vus de leur intérieur, paraîtraient semblables à la Voie lactée. Si l’on réfléchit maintenant à cette profusion d’étoiles et de nébuleuses répandues dans l’espace céleste et aux intervalles immenses qui les séparent, l’imagination, étonnée de la grandeur de l’univers, aura peine à lui concevoir des bornes.

Herschel, en observant les nébuleuses au moyen de ces puissants télescopes, a suivi les progrès de leur condensation, non sur une seule, ces progrès ne pouvant devenir sensibles pour nous qu’après des siècles, mais sur leur ensemble, comme on suit dans une vaste forêt l’accroissement des arbres sur les individus de divers âges qu’elle renferme. Il a d’abord observé la matière nébuleuse répandue en amas divers dans les différentes parties du ciel dont elle occupe une grande étendue. Il a vu dans quelques-uns de ces amas cette matière faiblement condensée autour d’un ou de plusieurs noyaux peu brillants. Dans d’autres nébuleuses, ces noyaux brillent davantage relativement à la nébulosité qui les environne. Les atmosphères de chaque noyau venant à se séparer par une condensation ultérieure, il en résulte des nébuleuses multiples, formées de noyaux brillants très voisins et environnés chacun d’une atmosphère ; quelquefois la matière nébuleuse, en se condensant d’une manière uniforme, produit les nébuleuses que l’on nomme planétaires. Enfin, un plus grand degré de condensation transforme toutes ces nébuleuses en étoiles. Les nébuleuses, classées d’après cette vue philosophique, indiquent avec une extrême vraisemblance leur transformation future en étoiles et l’état antérieur de nébulosité des étoiles existantes. Ainsi l’on descend, par le progrès de la condensation de la matière nébuleuse, à la considération du Soleil environné autrefois d’une vaste atmosphère, considération à laquelle je suis remonté par l’examen des phénomènes du système solaire, comme on le verra dans la Note dernière. Une rencontre aussi remarquable,