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dans le ciel pour assurer la durée du système planétaire, par des vues semblables à celles qu’elle nous paraît suivre si admirablement sur la Terre, pour la conservation des individus et pour la perpétuité des espèces.

C’est principalement à l’attraction des grands corps placés au centre du système des planètes et des systèmes des satellites qu’est due la stabilité de ces systèmes que l’action mutuelle de tous ces corps et les attractions étrangères tendent sans cesse à troubler. Si l’action de Jupiter venait à cesser, ses satellites, que nous voyons se mouvoir autour de lui suivant un ordre admirable, se disperseraient aussitôt, les uns en décrivant autour du Soleil des ellipses très allongées, les autres en s’éloignant indéfiniment dans des orbes hyperboliques. Ainsi l’inspection attentive du système solaire nous montre la nécessité d’une force centrale très puissante, pour maintenir l’ensemble d’un système et la régularité de ses mouvements.

Ces considérations seules expliqueraient la disposition du système solaire, si le géomètre ne devait pas étendre plus loin sa vue, et chercher dans les lois primordiales de la nature la cause des phénomènes le plus indiqués par l’ordre de l’univers. Déjà quelques-uns d’eux ont été ramenés à ces lois. Ainsi la stabilité des pôles de la Terre à sa surface et celle de l’équilibre des mers, l’une et l’autre si nécessaires à la conservation des êtres organisés, ne sont qu’un simple résultat du mouvement de rotation et de la pesanteur universelle. Par sa rotation, la Terre a été aplatie et son axe de révolution est devenu l’un de ses axes principaux, ce qui rend invariables les climats et la durée du jour. En vertu de la pesanteur, les couches terrestres les plus denses se sont rapprochées du centre de la Terre, dont la moyenne densité surpasse ainsi celle des eaux qui la recouvrent, ce qui suffit pour assurer la stabilité de l’équilibre des mers et pour mettre un frein à la fureur des flots. Ces phénomènes et quelques autres semblablement expliqués autorisent à penser que tous dépendent de ces lois, par des rapports plus ou moins cachés, mais dont il est plus sage d’avouer l’ignorance que d’y substituer des causes imaginées par le seul besoin