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aimants, en parcourant pour se joindre des espaces réciproques à leurs masses. Si la Terre et la Lune n’étaient pas retenues à la distance qui les sépare par une force animale ou par quelque autre force équivalente, elles tomberaient l’une sur l’autre, la Lune faisant les du chemin et la Terre faisant le reste, en les supposant également denses.

» Si la Terre cessait d’attirer les eaux de l’Océan, elles se porteraient sur la Lune, en vertu de la force attractive de cet astre.

» Cette force, qui s’étend jusqu’à la Terre, y produit les phénomènes du flux et du reflux de la mer. »

Ainsi l’important Ouvrage que nous venons de citer contient les premiers germes de la Mécanique céleste, que Newton et ses successeurs ont si heureusement développés.

On doit être étonné que Kepler n’ait pas appliqué aux comètes les lois du mouvement elliptique. Mais, égaré par une imagination ardente, il laissa échapper le fil de l’analogie qui devait le conduire à cette grande découverte. Les comètes, suivant lui, n’étant que des météores engendrés dans l’éther, il négligea d’étudier leurs mouvements, et il s’arrêta au milieu de la carrière qu’il avait ouverte, laissant à ses successeurs une partie de la gloire qu’il pouvait encore acquérir. De son temps on commençait à peine à entrevoir la méthode de procéder dans la recherche de la vérité, à laquelle le génie ne parvenait que par instinct et en y mêlant souvent beaucoup d’erreurs. Au lieu de s’élever péniblement, par une suite d’inductions, des phénomènes particuliers à d’autres plus étendus et de ceux-ci aux lois générales de la nature, il était plus agréable et plus facile de subordonner tous les phénomènes à des rapports de convenance et d’harmonie, que l’imagination créait et modifiait à son gré. Ainsi Kepler expliqua la disposition du système solaire par les lois de l’harmonie musicale. Il est affligeant pour l’esprit humain de voir ce grand homme, même dans ses derniers Ouvrages, se plaire avec délices dans ces chimériques spéculations, et les regarder comme l’âme et la vie de l’Astronomie. Leur mélange avec ses véritables découvertes fut, sans doute, la cause pour laquelle les astronomes de son temps, Descartes lui-même et Galilée, qui pouvaient tirer