Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/46

Cette page a été validée par deux contributeurs.
30
EXPOSITION DU SYSTÈME DU MONDE.


Lune, qui sont les mêmes et arrivent au même instant pour tous les lieux de la Terre où elles sont visibles.

On voit souvent l’ombre d’un nuage emporté par les vents parcourir rapidement les coteaux et les plaines, et dérober aux spectateurs qu’elle atteint la vue du Soleil, dont jouissent ceux qui sont au delà de ses limites : c’est l’image exacte des éclipses totales de Soleil. On aperçoit alors autour du disque lunaire une couronne d’une lumière pâle, et qui probablement est l’atmosphère même du Soleil ; car son étendue ne peut convenir à celle de la Lune, et l’on s’est assuré par les éclipses du Soleil et des étoiles que cette dernière atmosphère est presque insensible.

L’atmosphère dont on peut concevoir la Lune environnée infléchit les rayons lumineux vers le centre de cet astre, et si, comme cela doit être, les couches atmosphériques sont plus rares, à mesure qu’elles sont plus élevées, ces rayons, en y pénétrant, s’infléchissent de plus en plus et décrivent une courbe concave vers sa surface. Un observateur placé sur la Lune ne cesserait donc de voir un astre que lorsqu’il serait placé au-dessous de son horizon, d’un angle que l’on nomme réfraction horizontale. Les rayons émanés de cet astre vu à l’horizon, après avoir rasé la surface de la Lune, continuent leur route en décrivant une courbe semblable à celle par laquelle ils y sont parvenus. Ainsi un second observateur placé derrière la Lune, relativement à l’astre, l’apercevrait encore, en vertu de l’inflexion de ses rayons dans l’atmosphère lunaire. Le diamètre de la Lune n’est point sensiblement augmenté par la réfraction de son atmosphère ; une étoile éclipsée par cet astre l’est donc plus tard que si cette atmosphère n’existait point, et, par la même raison, elle cesse plus tôt d’être éclipsée, en sorte que l’influence de l’atmosphère lunaire est principalement sensible sur la durée des éclipses du Soleil et des étoiles par la Lune. Des observations précises et multipliées ont fait à peine soupçonner cette influence, et l’on s’est assuré qu’à la surface de la Lune la réfraction horizontale n’excède pas 5″. Cette réfraction, sur la Terre, est au moins mille fois plus grande ; l’atmosphère lunaire, si elle existe, est