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point situé au delà du centre de son orbite par rapport au Soleil. Il reconnut la même chose pour la Terre, en comparant entre elles des observations choisies de Mars, dont l’orbe, par la grandeur de sa parallaxe annuelle, est propre à faire connaître les dimensions respectives de l’orbe terrestre. Kepler, guidé par le principe que les foyers des mouvements célestes devaient être au centre de grands corps attractifs, conclut de ces résultats que les mouvements réels des planètes sont variables, et qu’aux deux points de la plus grande et de la plus petite vitesse, les aires décrites dans un jour par le rayon vecteur d’une planète autour du Soleil sont les mêmes. Il étendit cette égalité des aires à tous les points de l’orbite, ce qui lui donna la loi des aires proportionnelles aux temps. Ensuite les observations de Mars vers ses quadratures lui firent connaître que l’orbe de cette planète est un ovale allongé dans le sens du diamètre qui joint les points des vitesses extrêmes, ce qui le conduisit enfin au mouvement elliptique.

Sans les spéculations des Grecs sur les courbes que forme la section du cône par un plan, ces belles lois seraient peut-être encore ignorées. L’ellipse étant une de ces courbes, sa figure oblongue fit naître dans l’esprit de Kepler la pensée d’y mettre en mouvement la planète Mars et bientôt, au moyen des nombreuses propriétés que les anciens géomètres avaient trouvées sur les sections coniques, il s’assura de la vérité de cette hypothèse. L’histoire des sciences nous offre beaucoup d’exemples de ces applications de la Géométrie pure, et de ses avantages ; car tout se tient dans la chaîne immense des vérités, et souvent une seule observation a suffi pour féconder les plus stériles en apparence, en les transportant à la nature, dont les phénomènes ne sont que les résultats mathématiques d’un petit nombre de lois immuables.

Le sentiment de cette vérité donna probablement naissance aux analogies mystérieuses des Pythagoriciens ; elles avaient séduit Kepler et il leur fut redevable d’une de ses plus belles découvertes. Persuadé que les distances moyennes des planètes au Soleil et leurs révolutions devaient être réglées conformément à ces analogies, il les compara longtemps soit avec les corps réguliers de la Géométrie, soit avec les