Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/447

Cette page a été validée par deux contributeurs.



CHAPITRE IV.
DE L’ASTRONOMIE DANS L’EUROPE MODERNE.
_________



C’est principalement aux Arabes que l’Europe moderne doit les premiers rayons de lumière qui ont dissipé les ténèbres dont elle a été enveloppée pendant plus de douze siècles. Ils nous ont transmis avec gloire le dépôt des connaissances qu’ils avaient reçues des Grecs, disciples eux-mêmes des Égyptiens. Mais, par une fatalité déplorable, elles ont disparu chez tous ces peuples, à mesure qu’ils les ont communiquées. Depuis longtemps le despotisme, étendant sa barbarie sur les belles contrées qui furent le berceau des sciences et des arts, en a effacé jusqu’au souvenir des grands hommes qui les ont illustrées.

Alphonse, roi de Castille, fut un des premiers souverains qui encouragèrent l’Astronomie renaissante en Europe. Cette science compte peu de protecteurs aussi zélés ; mais il fut mal secondé par les astronomes qu’il avait réunis, et les Tables qu’ils publièrent ne répondirent point aux dépenses excessives qu’elles avaient occasionnées. Doué d’un esprit juste, Alphonse était choqué de l’embarras des cercles et des épicycles dans lesquels on faisait mouvoir les corps célestes. « Si Dieu », disait-il, « m’avait appelé à son conseil, les choses eussent été dans un meilleur ordre. » Par ces mots, qui furent taxés d’impiété, il faisait entendre que l’on était encore loin de connaître le mécanisme de l’univers. Au temps d’Alphonse, l’Europe dut aux encouragements de Frédéric II, empereur d’Allemagne, la première traduction latine de l’Almageste de Ptolémée, que l’on fit sur la version arabe.