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des cartes géographiques. Anaxagore fut persécuté par les Athéniens, pour avoir enseigné les vérités de l’école Ionienne. On lui reprocha d’anéantir l’influence des dieux sur la nature, en essayant d’assujettir ses phénomènes à des lois immuables. Proscrit avec ses enfants, il ne dut la vie qu’aux soins de Périclès, son disciple et son ami, qui parvint à faire changer la peine de mort en exil. Ainsi la vérité, pour s’établir sur la Terre, a souvent eu à combattre des erreurs accréditées, qui, plus d’une fois, ont été funestes à ceux qui l’ont fait connaître.

De l’école Ionienne sortit le chef d’une école beaucoup plus célèbre. Pythagore, né à Samos vers l’an 590 avant notre ère, fut d’abord disciple de Thalès, qui lui conseilla de voyager en Égypte, où il se fit initier aux mystères des prêtres, pour connaître à fond leur doctrine. Ensuite il alla sur les bords du Gange, interroger les Brahmanes. De retour dans sa patrie, le despotisme sous lequel elle gémissait alors le força de s’en exiler, et il se retira en Italie, où il fonda son école. Toutes les vérités astronomiques de l’école Ionienne furent enseignées avec plus de développement dans celle de Pythagore ; mais ce qui la distingue principalement est la connaissance des deux mouvements de la Terre, sur elle-même et autour du Soleil. Pythagore l’enveloppa d’un voile, pour la cacher au vulgaire ; mais elle fut exposée dans un grand jour par son disciple Philolaüs.

Suivant les Pythagoriciens, les comètes elles-mêmes sont en mouvement, comme les planètes, autour du Soleil ; ce ne sont point des météores passagers formés dans notre atmosphère, mais des ouvrages éternels de la nature. Ces notions parfaitement justes du Système du Monde ont été saisies et présentées par Sénèque avec l’enthousiasme qu’une grande idée sur l’un des objets les plus vastes des connaissances humaines doit exciter dans l’âme du philosophe : « Ne nous étonnons point », dit-il, « que l’on ignore encore la loi du mouvement des comètes, dont le spectacle est si rare, et qu’on ne connaisse ni le commencement ni la fin de la révolution de ces astres, qui descendent d’une énorme distance. Il n’y a pas quinze cents ans que la Grèce a compté les étoiles et leur a donné des noms… Le jour viendra que,