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même que, dans un système de corps solides et fluides animés par la pesanteur, la Mécanique nous montre plusieurs états d’équilibre stable, la Chimie nous offre, dans la combinaison des mêmes principes, divers états permanents. Quelquefois deux premiers principes s’unissent ensemble, et les molécules formées de leur union s’unissent à celles d’un troisième principe : telle est, selon toute apparence, la combinaison des principes constituants d’un acide avec une base. D’autres fois, les principes d’une substance, sans être unis ensemble comme ils le sont dans la substance même, s’unissent à d’autres principes et forment avec eux des combinaisons triples ou quadruples, en sorte que cette substance, retirée par l’analyse chimique, est alors un produit de cette opération. Les mêmes molécules peuvent encore s’unir par diverses faces, et produire ainsi des cristaux différents par la forme, la dureté, la pesanteur spécifique et leur action sur la lumière. Enfin la condition d’un équilibre stable me paraît être ce qui détermine les rapports fixes suivant lesquels divers principes se combinent dans un grand nombre de circonstances, rapports qui, d’après l’expérience, paraissent être souvent les plus simples et de nombre à nombre. Tous ces phénomènes dépendent de la forme des molécules élémentaires, des lois de leurs forces attractives, de la force répulsive de l’électricité et de la chaleur, et peut-être d’autres forces encore inconnues. L’ignorance où nous sommes de ces données et leur complication extrême ne permettent pas d’en soumettre les résultats à l’Analyse mathématique. Mais on supplée ce grand avantage par le rapprochement des faits bien observés, en s’élevant par leur comparaison à des rapports généraux qui, liant ensemble un grand nombre de phénomènes, sont la base des théories chimiques dont ils étendent et perfectionnent les applications aux arts.

En voyant toutes les parties de la matière soumises à l’action de forces attractives, dont l’une s’étend indéfiniment dans l’espace, tandis que les autres cessent d’être sensibles aux plus petites distances perceptibles à nos sens, on peut se demander si ces dernières forces ne sont pas la première modifiée par la figure et les distances mutuelles