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nature, en sont la preuve. Au reste, on voit, par la note qui termine ses recherches, qu’il n’en a pas été content lui-même. Mais on doit lui rendre cette justice, qu’il était sur la voie qui devait conduire à la théorie générale des phénomènes capillaires. Lorsque je m’en occupais, Thomas Young en faisait pareillement le sujet de recherches fort ingénieuses, insérées dans les Transactions philosophiques. Il y compare, avec Segner, la force capillaire à la tension d’une surface liquide, en ayant égard à sa courbure dans deux directions perpendiculaires entre elles, et de plus il suppose que cette surface coupe toujours les parois des espaces capillaires sous un angle déterminé pour les mêmes substances, quelle que soit d’ailleurs la surface de ces parois, ce qui n’est exact qu’aux limites de la sphère d’activité sensible de ces substances, et cesse même de l’être au delà de ces limites, lorsque le liquide est à l’extrémité des parois, comme on l’a vu relativement aux surfaces des tubes et des disques qui le soulèvent. Mais Young n’a pas, ainsi que Segner, tenté de dériver ses hypothèses de l’attraction moléculaire, ce qui était indispensable pour les réaliser ; elles ne pouvaient l’être que par une démonstration pareille à celle que j’ai donnée dans ma première méthode, à laquelle les explications de Segner et d’Young se rattachent, comme celle de Jurin se rattache à la seconde manière dont j’ai considéré ce genre de phénomènes.

Je me suis beaucoup étendu sur les phénomènes capillaires, parce qu’indépendamment de l’intérêt qu’ils offrent par eux-mêmes, leur théorie répand un grand jour sur les attractions réciproques des molécules des corps, dont ils sont de très légères modifications. Le calcul nous montre, en effet, que l’action capillaire dérive de la force attractive, et qu’elle est à celle-ci dans un rapport beaucoup moindre que celui du rayon de la sphère d’activité sensible de cette force au rayon de courbure de la surface capillaire. Ainsi, en supposant ce dernier rapport égal à la force attractive de l’eau sur elle-même surpassera vingt mille fois l’action capillaire de ce liquide dans un tube de verre, large de 0m,001, action équivalente, suivant l’expérience, à une colonne d’eau de 0m,030 ; cette force surpassera donc la pression d’une