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moyen ces différences ; mais la grande influence de la vitesse de la lumière sur sa réfraction en passant dans un milieu diaphane fournit une méthode très précise pour déterminer les vitesses respectives des rayons lumineux. Il suffit, pour cela, de fixer un prisme de verre au devant de l’objectif d’une lunette et de mesurer la déviation qui en résulte dans la position apparente des astres. On a reconnu de cette manière que les vitesses de la lumière directe et réfléchie de tous les objets célestes et terrestres étaient exactement les mêmes. Les expériences que M. Arago a bien voulu faire à ma prière ne laissent aucun doute sur ce point de Physique, important à l’Astronomie en ce qu’il prouve la justesse des formules de l’aberration des astres.

La vitesse de la lumière des étoiles n’est pas, relativement à un observateur, la même dans tous les points de l’orbe terrestre. Elle est la plus grande lorsque son mouvement est contraire à celui de la Terre ; elle est la plus petite quand ces deux mouvements conspirent. Quoique la différence qui en résulte dans la vitesse relative d’un rayon lumineux ne s’élève qu’à un cinq-millième environ de la vitesse totale, cependant elle peut produire des changements sensibles dans la déviation de la lumière qui traverse un prisme. Des expériences très précises, faites par M. Arago, ne les ayant point fait apercevoir, on doit en conclure que la vitesse relative d’un rayon lumineux homogène est constamment la même, et probablement déterminée par la nature du fluide qu’il met en mouvement dans nos organes pour produire la sensation de lumière. Cette conséquence paraît encore indiquée par l’égalité de vitesse de la lumière émanée des astres et des objets terrestres, égalité qui, sans cela, serait inexplicable. Est-il invraisemblable de supposer que les corps lumineux lancent une infinité de rayons doués de vitesses différentes, et que les seuls rayons dont la vitesse est comprise dans certaines limites ont la propriété d’exciter la sensation de lumière, tandis que les autres ne produisent qu’une chaleur obscure ? N’est-ce pas ainsi que les corps chauds deviennent lumineux, par un accroissement de chaleur ? et les belles expériences d’Herschel sur la chaleur du spectre solaire ne prouvent-elles pas que le Soleil émet des rayons