Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/37

Cette page a été validée par deux contributeurs.
21
LIVRE I. — CHAPITRE III.


obvie à cet inconvénient, par l’usage d’une petite période indépendante des mois et des années : telle est la semaine, qui, depuis la plus haute antiquité dans laquelle se perd son origine, circule sans interruption à travers les siècles, en se mêlant aux calendriers successifs des différents peuples. Il est très remarquable qu’elle se trouve identiquement la même sur toute la terre, soit relativement à la dénomination de ses jours, réglée sur le plus ancien système d’astronomie, soit par rapport à leur correspondance au même instant physique. C’est peut-être le monument le plus ancien et le plus incontestable des connaissances humaines ; il paraît indiquer une source commune d’où elles se sont répandues ; mais le système astronomique qui lui sert de base est une preuve de leur imperfection à cette origine.

Il était facile, lorsqu’on réforma le calendrier grégorien, de fixer au solstice d’hiver le commencement de l’année, ce qui aurait fait concourir l’origine de chaque saison avec le commencement d’un mois. Il était facile encore de rendre plus régulière la longueur des mois, en donnant vingt-neuf jours à celui de février dans les années communes, et trente jours dans les bissextiles, et en faisant les autres mois alternativement de trente-un et de trente jours : il eût été commode de les désigner tous par leur rang ordinal. En corrigeant ensuite, comme on vient de le dire, l’intercalation adoptée, le calendrier grégorien n’eût laissé presque rien à désirer. Mais convient-il de lui donner ce degré de perfection ? Il me semble qu’il n’en résulterait pas assez d’avantages pour compenser les embarras qu’un pareil changement introduirait dans nos habitudes, dans nos rapports avec les autres peuples, et dans la chronologie, déjà trop compliquée par la multitude des ères. Si l’on considère que ce calendrier est maintenant celui de presque toutes les nations d’Europe et d’Amérique, et qu’il a fallu deux siècles et toute l’influence de la religion pour lui procurer cette universalité, on sentira qu’il importe de lui conserver un aussi précieux avantage, aux dépens même d’une perfection qui ne porte pas sur des points essentiels. Car le principal objet d’un calendrier est d’offrir un moyen simple d’attacher les événements à la série des jours, et, par un mode