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On a tiré un parti très avantageux de ces variétés dans la dispersion de la lumière à travers des lentilles de différentes espèces de verre, pour détruire les couleurs dont les objets paraissent environnés dans les lunettes ordinaires, ce qui a procuré une grande perfection à ces instruments si utiles à l’Astronomie.

Les lois précédentes du mouvement de la lumière se modifient dans les cristaux diaphanes, et la lumière y présente un singulier phénomène, qui fut d’abord observé dans le cristal d’Islande. Un rayon lumineux qui tombe perpendiculairement sur une face d’un rhomboïde naturel de ce cristal se divise en deux faisceaux ; l’un traverse le cristal sans changer sa direction ; l’autre s’en écarte dans un plan parallèle au plan mené, perpendiculairement à la face, par la ligne qui joint les deux angles solides obtus de ce rhomboïde et qui, par conséquent, est également inclinée aux côtés de ces angles. Cette ligne est ce que l’on nomme axe du cristal, et l’on appelle section principale d’une face naturelle ou artificielle un plan mené par cet axe perpendiculairement à la face et tout plan qui lui est parallèle.

La division du rayon lumineux a lieu relativement à une incidence quelconque ; une partie suit la loi de la réfraction ordinaire ; l’autre partie suit une loi reconnue par Huygens, et qui, considérée comme un résultat de l’expérience, peut être mise au rang des plus belles découvertes de ce rare génie. Il y fut conduit par la manière ingénieuse dont il envisageait la propagation de la lumière, qu’il concevait formée des ondulations d’un fluide éthéré. Il supposait, dans les milieux diaphanes non cristallisés, la vitesse de ces ondulations plus petite que dans le vide et la même dans tous les sens. Mais, dans le cristal d’Islande, il imaginait deux espèces d’ondulations. La vitesse de la première était représentée, comme dans les milieux non cristallisés, par les rayons d’une sphère dont le centre serait au point d’incidence du rayon lumineux sur la face du cristal ; la vitesse de la seconde était variable et représentée par les rayons d’un ellipsoïde de révolution, aplati à ses pôles, ayant le même centre que la sphère précédente, et dont l’axe de révolution serait parallèle à l’axe du cristal. Huygens n’assignait point