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l’appuie, soit en augmentant le nombre des phénomènes qu’elle explique. Le principe de la pesanteur a procuré ces deux avantages à la théorie du mouvement de la Terre. Comme il en est une suite nécessaire, il n’ajoute aucune supposition nouvelle à cette théorie ; mais pour expliquer les mouvements des astres, Copernic admettait dans la Terre trois mouvements distincts, l’un autour du Soleil, un autre de révolution sur elle-même, enfin un troisième mouvement de ses pôles autour de ceux de l’écliptique. Le principe de la pesanteur les fait dépendre tous d’un seul mouvement imprimé à la Terre, suivant une direction qui ne passe point par son centre de gravité. En vertu de ce mouvement, elle tourne autour du Soleil et sur elle-même ; elle a pris une figure aplatie à ses pôles, et l’action du Soleil et de la Lune sur cette figure fait mouvoir lentement l’axe de la Terre autour des pôles de l’écliptique. La découverte de ce principe a donc réduit au plus petit nombre possible les suppositions sur lesquelles Copernic fondait sa théorie. Elle a d’ailleurs l’avantage de lier cette théorie à tous les phénomènes astronomiques. Sans elle, l’ellipticité des orbes planétaires, les lois que les planètes et les comètes suivent dans leurs mouvements autour du Soleil, leurs inégalités séculaires et périodiques, les nombreuses inégalités de la Lune et des satellites de Jupiter, la précession des équinoxes, la nutation de l’axe terrestre, les mouvements de l’axe lunaire, enfin le flux et le reflux de la mer ne seraient que des résultats de l’observation, isolés entre eux. C’est une chose vraiment digne d’admiration que la manière dont tous ces phénomènes, qui semblent, au premier coup d’œil, fort disparates, découlent d’une même loi, qui les enchaîne au mouvement de la Terre, en sorte que, ce mouvement étant une fois admis, on est conduit par une suite de raisonnements géométriques à ces phénomènes. Chacun d’eux fournit donc une preuve de son existence, et si l’on considère qu’il n’y en a pas maintenant un seul qui ne soit ramené à la loi de la pesanteur ; que, cette loi déterminant avec la plus grande exactitude la position et les mouvements des corps célestes, à chaque instant et dans tout cours, il n’est pas à craindre qu’elle soit démentie par quelque phéno-