Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/346

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les observations ne permettent pas de lui supposer une ellipticité plus grande que  ; ces observations concourent donc avec celles du pendule à faire rejeter cette hypothèse.

On a supposé, dans ce qui précède, que la Terre est entièrement solide ; mais cette planète étant recouverte en grande partie par les eaux de la mer, leur action ne doit-elle pas changer les phénomènes de la précession et de la nutation ? C’est ce qu’il importe d’examiner.

Les eaux de la mer cédant, en vertu de leur fluidité, aux attractions du Soleil et de la Lune, il semble au premier coup d’œil que leur réaction ne doit point influer sur les mouvements de l’axe de la Terre ; aussi d’Alembert et tous les géomètres qui se sont occupés après lui de ces mouvements l’ont entièrement négligée ; ils sont même partis de là pour concilier les quantités observées de la précession et de la nutation avec les mesures des degrés terrestres. Cependant un plus profond examen de cette matière nous montre que la fluidité des eaux n’est pas une raison suffisante pour négliger leur effet sur la précession des équinoxes ; car, si d’un côté elles obéissent à l’action du Soleil et de la Lune, d’un autre côté la pesanteur les ramène sans cesse vers l’état d’équilibre et ne leur permet de faire que de très petites oscillations ; il est donc possible que, par leur attraction et leur pression sur le sphéroïde qu’elles recouvrent, elles rendent, au moins en partie, à l’axe de la Terre les mouvements qu’il en recevrait, si elles venaient à se consolider. On peut d’ailleurs s’assurer, par un raisonnement fort simple, que leur réaction est du même ordre que l’action directe du Soleil et de la Lune sur la partie solide de la Terre.

Imaginons que cette planète soit homogène et de même densité que la mer ; supposons, de plus, que les eaux prennent à chaque instant la figure qui convient à l’équilibre des forces qui les animent. Si dans ces hypothèses la Terre devenait tout à coup entièrement fluide, elle conserverait la même figure, et toutes ses parties se feraient mutuellement équilibre ; l’axe de rotation n’aurait donc aucune tendance à se mouvoir, et il est visible que cela doit subsister encore dans le cas où une partie de cette masse formerait, en se consolidant, le sphéroïde