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En 1738, l’Académie des Sciences proposa la cause du flux et du reflux de la mer pour le sujet du prix de Mathématiques qu’elle décerna en 1740. Quatre pièces furent couronnées : les trois premières, fondées sur le principe de la pesanteur universelle, étaient de Daniel Bernoulli, d’Euler et de Maclaurin. Le jésuite Cavalleri, auteur de la quatrième, avait adopté le système des tourbillons. Ce fut le dernier honneur rendu à ce système par l’Académie, qui se remplissait alors de jeunes géomètres dont les heureux travaux devaient contribuer si puissamment au progrès de la Mécanique céleste.

Les trois pièces qui ont pour base la loi de la pesanteur universelle sont des développements de la théorie de Newton. Elles s’appuient non seulement sur cette loi, mais encore sur l’hypothèse adoptée par ce grand géomètre, savoir que la mer prend à chaque instant la figure où elle serait en équilibre sous l’astre qui l’attire.

La pièce de Bernoulli est celle qui contient les développements les plus étendus. Bernoulli attribue, comme Newton, le retard des maxima et minima des marées sur les instants des syzygies et des quadratures, à l’inertie des eaux de la mer, et peut-être, ajoute-t-il, une partie de ce retard dépend du temps que l’action de la Lune emploie à parvenir à la Terre. Mais j’ai reconnu que l’attraction universelle se transmet entre les corps célestes avec une vitesse qui, si elle n’est pas infinie, surpasse plusieurs millions de fois la vitesse de la lumière, et l’on sait que la lumière de la Lune parvient en moins de deux secondes à la Terre.

D’Alembert, dans son Traité sur la cause générale des vents, qui remporta, en 1746, le prix proposé sur cet objet par l’Académie des Sciences de Prusse, considéra les oscillations de l’atmosphère produites par les attractions du Soleil et de la Lune. En supposant la Terre privée de son mouvement de rotation, dont il jugeait la considération inutile dans ces recherches, et supposant l’atmosphère partout également dense et soumise à l’attraction d’un astre en repos, il détermina les oscillations de ce fluide. Mais lorsqu’il voulut traiter le cas où l’astre est en mouvement, la difficulté du problème le força de recourir, pour