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la Terre. Quoi qu’il en soit de cette cause assignée par quelques philosophes à ces phénomènes, je le répète, on doit être rassuré sur un aussi terrible événement pendant le court intervalle de la vie, d’autant plus qu’il paraît que les masses des comètes sont d’une petitesse extrême, et qu’ainsi leur choc ne produirait que des révolutions locales. Mais l’homme est tellement disposé à recevoir l’impression de la crainte que l’on a vu, en 1773, la plus vive frayeur se répandre dans Paris et de là se communiquer dans toute la France, sur la simple annonce d’un Mémoire dans lequel Lalande déterminait celles des comètes observées qui peuvent le plus approcher de la Terre : tant il est vrai que les erreurs, les superstitions, les vaines terreurs et tous les maux qu’entraîne l’ignorance se reproduiraient promptement, si la lumière des sciences venait à s’éteindre.

Les observations de la comète aperçue la première, en 1770, ont conduit les astronomes à un résultat très singulier. Après avoir inutilement tenté d’assujettir ces observations aux lois du mouvement parabolique, qui jusqu’alors avait représenté à fort peu près celui des comètes, ils ont enfin reconnu qu’elle a décrit pendant son apparition une ellipse, dans laquelle la durée de sa révolution n’a pas surpassé six années. Lexell, qui le premier fit cette curieuse remarque, satisfit de cette manière à l’ensemble des observations de la comète. Mais une aussi courte durée ne pouvait être admise que d’après des preuves incontestables, fondées sur une discussion nouvelle et approfondie des observations de la comète et des positions des étoiles auxquelles on l’a comparée. L’Institut proposa donc cette discussion pour sujet d’un prix, que M. Burckhardt a remporté, et ses recherches l’ont conduit à fort peu près au résultat de Lexell, sur lequel il ne doit maintenant rester aucun doute. Une comète dont la révolution est aussi prompte devrait souvent reparaître ; cependant elle n’avait point été observée avant 1770, et depuis on ne l’a point revue. Pour expliquer ce double phénomène, Lexell a remarqué qu’en 1767 et 1779 cette comète a fort approché de Jupiter dont l’attraction puissante a diminué en 1767 la distance périhélie de son orbite, de manière à rendre cet astre visible