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vait fait encore, celles que l’on avait déjà soumises au calcul, je vis tous les phénomènes observés dans le mouvement de ces deux planètes s’adapter d’eux-mêmes à la théorie ; ils semblaient auparavant faire exception à la loi de la pesanteur universelle, et maintenant, ils en sont une des preuves les plus frappantes. Tel a été le sort de cette brillante découverte de Newton, que chaque difficulté qui s’est élevée a été pour elle le sujet d’un nouveau triomphe, ce qui est le plus sûr caractère du vrai système de la nature. Les formules auxquelles je suis parvenu pour représenter les mouvements de Jupiter et de Saturne satisfont avec une précision remarquable aux oppositions de ces deux planètes, observées par les plus habiles astronomes, au moyen des meilleures lunettes méridiennes et des plus grands quarts de cercle ; l’erreur n’a jamais atteint 40″, et il n’y a pas vingt ans que les erreurs des meilleures Tables surpassaient quelquefois 4000″. Ces formules représentent encore, avec l’exactitude des observations mêmes, les observations de Flamsteed, celles des Arabes et les observations citées par Ptolémée. Cette grande précision, avec laquelle les deux plus grosses planètes de notre système planétaire ont obéi depuis les temps les plus reculés aux lois de leur attraction mutuelle, prouve la stabilité de ce système, puisque Saturne, dont l’attraction par le Soleil est environ cent fois moindre que l’attraction de la Terre par le même astre, n’a cependant éprouvé, depuis Hipparque jusqu’à nous, aucune action sensible de la part des causes étrangères.

Je ne puis m’empêcher ici de comparer les effets réels du rapport qui existe entre les moyens mouvements de Jupiter et de Saturne avec ceux que l’Astrologie lui avait attribués. En vertu de ce rapport, les conjonctions mutuelles de ces deux planètes se renouvellent dans l’intervalle d’environ vingt années ; mais le point du ciel où elles arrivent rétrograde à peu près d’un tiers du zodiaque, en sorte que, si la conjonction arrive dans le premier point d’Ariès, elle aura lieu vingt ans après dans le signe du Sagittaire ; vingt ans encore après, elle arrivera dans le signe du Lion, pour revenir ensuite au signe du Bélier à 10° de distance de sa position primitive. Elle continuera ainsi d’a-